mardi 27 mai 2014

Tomb Raider - Lara Croft Begins

Quand je pense à la série des Tomb Raider,  cela me ramène aux premiers titres de la Playstation, pas encore One à l'époque. En allant chez un pote, je jouais alors à Resident Evil, Tekken ou Final Fantasy 7, mais je n'avais pas accroché aux gros blocs de Lara Croft. Même pour 1996 / 1997, ça me semblait trop cubique, une sorte de Minecraft avant l'heure, et les environnements semblaient particulièrement vides. La sortie du second épisode a renforcé cette impression de vide quand un autre ami me disait que les développeurs "ont rallongé sa natte".

Mais après mon long black out sur les jeux vidéo, lors de mon achat d'une PS3, j'avais pris d'occasion Tomb Raider Anniversary: remake de l'épisode original, c'était l'occasion de découvrir enfin une série "marquante", même si son personnage principal a rapidement écrasé l'intérêt du jeu lui-même. Et le jeu n'est pas dégueulasse: moins raide que ses aînés, je comprenais alors mieux le plaisir de dégommer des loups ou dinosaures à coup de double pistolet, entre deux saltos sur des blocs de pierre ou des barres fixes. Mais le jeu restait relativement trop long avec des séquences peu palpitantes.

Quelque temps plus vint, par la magie du jeu téléchargeable, l'excellent Lara Croft and the Guardian of Light. Épisode à part de la chronologie "officielle" des Tomb Raider, ce spin-off changeait (enfin) la donne avec une vue de dessus en fausse 3D isométrique, comme à la grande époque des Batman ou Head over Heels sur CPC. Joie des énigmes et perspectives, le jeu était également nerveux avec de nombreux ennemis et combats à l'arme à feu, plus toute une série de secrets à découvrir ou challenges à relever. Il doit faire partie des rares jeux où je me suis efforcé à compléter des niveaux sous la pression d'un chronomètre. Côté histoire, circulez y a rien à voir, mais l'ambiance Indiana Jones and the Temple of Doom dans les décors et ennemis ajoutait un sacré charme à ce titre.

Après ces pérégrinations, me voilà enfin au titre qui nous intéresse, Tomb Raider (tout court).


A la manière des films de super-héros, la série a droit à son reboot, avec un retour sur les jeunes années de Lara Croft. Ou plutôt les malheurs de Lara Croft, vu ce qui lui arrive perpétuellement dans la face: les seules 5 premières minutes la font survivre à un naufrage sur une île maudite, chuter d'un plafond où elle était pendue, s'empaler sur une tige métallique (ouch...), échapper à des éboulements et un ennemi particulièrement collant, pour enfin s'extirper des souterrains. Et ce n'est que le début, le reste des festivités étant particulièrement traumatisant pour toute personne normalement constituée.

Cet enchaînement quasi-ininterrompu de situations critiques permet de maintenir une tension constante dans le jeu, même si il suffit souvent de presser un bouton ou avoir un bon timing pour s'en sortir. Si le scénario est classique, avec des personnages secondaires qui correspondent aux archétypes du genre (la figure paternelle, la meilleure amie, le vieux grognon, le gentil costaud, etc.), la multitude d'évènements en met plein la vue, et vient clairement affronter Uncharted (avec Nathan Drake, héritier masculin de Lara Croft) sur son propre terrain.

Mais alors que Uncharted joue sur un côté pulp / aventures clairement associé à Indiana Jones et un bon esprit gouailleur, Tomb Raider veut jouer la carte du réalisme dark façon Christopher Nolan pour son Batman. Mais à force de voir Lara Croft se rattraper in-extremis à des corniches ou jouer les funambules dans une tempête, cette volonté porte à rire face à l'absurdité des situations ("oh tiens, je cours dans un bateau qui coule: ça change de courir dans une maison en feu. Ou un pont qui tombe. Ou avec un avion qui s'écrase dans mon dos"). Pire encore, le jeu part à la limite du grand guignol avec des passages bien gores et poisseux (vu les différentes animations de mort, les développeurs sont des sadiques, avec une préférence pour l'empalement): Lara a droit à (au moins) un empalement, des blessures par balles et flèches, une cautérisation à la lame chauffée à blanc façon Rambo. Mention spéciale pour la scène où elle sort d'une rivière de sang, pour se retrouver dans une ambiance à la The Descent.

Face à tel déchaînement de traumatismes, difficile d'imaginer comment une jeune universitaire de 21 ans devienne d'un seul coup une véritable machine à tuer: un semblant de psychologie est introduit quand elle tue un homme pour la première fois, semblant ressentir de la peur, du dégoût, mais dans la minute qui suit, c'est un festival de headshots au tir à l'arc! La fin semble sous-entendre que Lara n'attend qu'une chose: repartir à l'aventure pour découvrir d'autres mystères et légendes, mais surtout pour tuer un maximum de gens! A sa place, j'aurais pris 20 ans de thérapie, et une peur panique des bâteaux, avions, hélicoptères, feux de camp... En comparaison, les Uncharted ont su garder une part de fantaisie qui fait que l'improbable est plus facilement accepté, et l'on se sent dans la peau de Nathan Drake. Ici, je n'ai pu que compatir pour Lara Croft face à un tel déchaînement de violence à son égard. Comment ses compagnons d'infortune (relativement épargnés en comparaison) peuvent-ils rester de marbre face à une telle transformation, couverte de blessures, de sang, et armée jusqu'aux dents?

Si le jeu présente de nombreuses incohérences (en le regardant avec du recul), il reste particulièrement prenant manette en main. Il reprend énormément de mécaniques et idées aux Uncharted (juste retour des choses), mais la seule présence de l'arc comme arme ajoute un aspect bien plus organique aux combats. Cela va plus loin par la suite avec l'introduction du piolet et de mouvements spéciaux avec les armes à feu (amis de la tripe, bonjour...), mais les combats sont particulièrement bien retranscrits au niveau sonore, avec une véritable impression de recul ou de puissance des armes. Histoire de rappeler qu'il s'agit d'un Tomb Raider, quelques énigmes et séquences plateformes sont présentes, mais la narration prend largement le pas, avec de nombreuses cinématiques entre deux gunfights. 

Même si la promotion du jeu et les premières informations laissaient penser que l'aspect survie serait mis en avant avec en particulière la chasse d'animaux sauvages, il s'agit en fait d'une activité totalement optionnelle, histoire de gagner de l'expérience en tuant des lapins ou chevreuils, loin d'un Assassin's Creed III ou Far Cry 3 à ce niveau. La survie se "vit" uniquement via l'histoire de Lara Croft, pour s'achever sur une tagline assez paresseuse, "a survivor is born".

En me relisant, j'ai l'impression d'émettre beaucoup de critiques sur un jeu qui m'a vraiment plu et captivé pendant une dizaine d'heures. En termes de plaisir vidéoludique, c'est un très bon jeu: il y a peu d'originalité, mais la réalisation est d'une niveau très impressionnant sur la désormais vieille PS3, et la jouabilité est bien pensée. Seulement, l'histoire se maintient via une série perpétuelle d'électrochocs, qui dans la réalité mènerait à un arrêt cardiaque. A trop vouloir jouer la carte "réaliste", les effets perdent de leur valeur, ce qui m'a souvent fait dire devant mon écran "mais n'importe quoi..." tantôt rieur, tantôt désabusé. Il n'empêche que la scène où Lara utilise ses fameux doubles revolvers pour la première fois est particulièrement jouissive, faisant le lien entre la Lara Croft que l'on connait depuis plus de 15 ans, et sa version padawan. Et cela vaut mieux que tous les empalements du jeu.

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